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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Article du mois de janvier 2003

(Paru au n° 118 de Janvier 2003)

Vos contrats et bons de commande sont ils valablement signés ?


De nombreuses commandes ou transactions commerciales sont dans les faits conclus par des salariés, voire des artistes ou techniciens qui n'ont pas nécessairement un statut très clair vis-à-vis de l'entreprise au nom duquel elles sont conclues. Quelle valeur ont alors ces signatures et les contrats qu'elles sont censées ratifier ?

Quand une personne s'engage au nom d'une entreprise, qu'il s'agisse de la signature de la commande d'affiches, de fournitures diverses, ou d'un contrat d'option pour une production ou d'achat de spectacle, il est en effet indispensable de vérifier que le signataire a bien la capacité juridique d'engager l'entreprise. La cour de cassation vient de rappeler, dans un arrêt du 11 juin 2002, qu'en présence d'une commande d'un montant élevé et en fonction des circonstances, il pouvait être nécessaire de vérifier les pouvoirs du signataire d'un bon de commande et que la seule apposition du cachet de l'entreprise ne suffisait pas à valider ses pouvoirs (1).

Nous avons en conséquence jugé utile de rappeler les règles légales de représentation dans les principales structures juridiques utilisées dans nos secteurs, et les principes régissant le mandat apparent en cas de non respect formel de ces règles de représentation.

La représentation légale de l'entreprise


Seuls les représentants légaux sont qualifiés pour engager la société à l’égard des tiers. Les représentants légaux sont désignés soit par le cadre légal créant la structure juridique, soit par les statuts lorsque le cadre légal est muet sur cette question.

Sociétés à responsabilité limitée (SARL)


Le gérant est investi, dans les rapports avec les tiers, des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Ainsi, si les statuts organisent des clauses limitant par exemple le pouvoir de signature du gérant à un montant de 10 000 Euros, le contrat signé par le gérant avec un client ou fournisseur à l’encontre de cette clause est néanmoins valable, le gérant devant éventuellement rendre des comptes à ses seuls associés. La société est engagée même par les actes du gérant qui ne relève pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou les pouvoirs d'engagement du gérant, ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances (2).

Société anonyme à conseil d’administration (SA)


La société est engagée, dans les rapports avec les tiers, même par les actes du conseil d’administration qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances (3).

Depuis la loi NRE (loi sur les nouvelles régulations économiques n° 2001-420 du 15 mai 2001) le président du conseil d’administration qui ne cumule pas les fonctions de directeur général et de président du conseil n’est plus le représentant légal de la société et ne peut donc plus l’engager vis-à-vis des tiers. En revanche le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Il représente la société dans ses rapports avec les tiers. La société est engagée même par les actes du directeur général qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances. Les dispositions des statuts ou les décisions du Conseil d’administration limitant les pouvoirs du directeur général sont inopposables aux tiers (4). Les directeurs généraux délégués disposent, à l’égard des tiers, des mêmes pouvoirs que le directeur général.

SA à directoire


Le directoire est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du directoire qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances. Les dispositions des statuts limitant les pouvoirs du directoire n’ont aucun effet juridique vis-à-vis des tiers (5).

Société par actions simplifiées (SAS)


Le président, désigné dans les conditions prévues par les statuts, représente la société à l’égard des tiers. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l’objet social. Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du président qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances. Les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont inopposables aux tiers (6).

Associations selon loi du 1er juillet 1901


Les textes sont muets sur cette question. Les pouvoirs des éventuels dirigeants sont déterminés par les statuts.

En l'absence de mention dans les statuts, c'est l'assemblée générale seule qui a le pouvoir d'engager l'association. Le fait qu'il existe un président ou des membres du bureau n'a aucune incidence sur cette question si les statuts ne définissent pas les pouvoirs conférés à ces fonctions ; la fonction de président se limitant alors à une fonction de présidence de l'assemblée générale ou du conseil d'administration. Selon la jurisprudence, dans le silence des statuts, les organes de direction (conseil ou bureau) ne peuvent exercer que les actes d’administration courante.

Si les statuts prévoient bien des règles de dévolution des pouvoirs à tel ou tel dirigeant, la question se pose alors de savoir s'il engage l'association lorsqu'il dépasse le cadre de ces pouvoirs statutaires. Il semble ne pas exister de jurisprudence sur cette question.

Nous ne pouvons en conséquence qu'inciter à se faire communiquer systématiquement les statuts des associations et à vérifier que le signataire a bien le pouvoir d'engager l'association.

Associations Loi d’Empire du 19 avril 1908 (Alsace-Moselle)


En vertu du code civil local, et à la différence de l'association 1901, l'association doit obligatoirement comporter une direction (article 26 du Code civil local) et celle-ci assure la représentation judiciaire et extra judiciaire de l’association ; elle a la situation d’un représentant légal. L’étendue de son pouvoir de représentation peut être limitée par les statuts avec effet à l’égard des tiers. Toutefois pour être opposable aux tiers, les restrictions de pouvoir de représentation de la direction doivent être inscrites sur le registre des associations (article 64 et 70 du Code civil local). Cette inscription, qui relève de la compétence du tribunal d’instance, permet à l’association d’acquérir la personnalité juridique complète.

Si la direction excède ses pouvoirs (de gestion interne) lorsqu’elle conclut un acte avec un tiers, cet acte demeure en principe régulier à l’égard de ce dernier et engage l’association. Il n’en va autrement que si le tiers, a pu avoir connaissance de ce dépassement de pouvoir en raison notamment du but de l’association ou de l’inscription au registre des restrictions statutaires.

Sociétés en nom collectif (SNC)

Le représentant légal est le(s) gérant(s). La plupart du temps, dans une SNC, chacun des associés est co-gérant. Dans les rapports avec les tiers, chacun des gérants engage la société par les actes entrant dans l’objet social. Les clauses statutaires limitant ses pouvoirs sont inopposables aux tiers (7).

Le nom du représentant légal d’une société est vérifiable sur l’extrait K bis disponible sur minitel ou internet. Pour les associations selon la loi de 1901, il est possible d'obtenir la copie des statuts en s'adressant au bureau des associations tenu dans chaque sous préfecture. Pour les associations selon la loi de 1908, il faut les réclamer au greffe du Tribunal d’Instance.
Toutefois le représentant légal peut déléguer ses pouvoirs. Si le contrat n'est pas signé par le représentant légal, il convient donc de se faire communiquer la copie du mandat incluant la délégation lui permettant de conclure l'acte.

Les règles du mandat et le mandat apparent

Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom (8). Le mandant est tenu d’exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné. Il n’est tenu de ce qui a pu être fait au delà, qu’autant qu’il l’a ratifié expressément ou tacitement (9).

Un directeur de production peut ainsi recevoir mandat du chef d’entreprise de signer tous engagements relatif à un film, il aura également le plus souvent la signature sur le compte bancaire ouvert au nom de la production dont il a la charge. Dans un tel cas, le chef d’entreprise assume les actes accomplis par le directeur de production, et ce dernier engage la société à l’égard des tiers dans les mêmes conditions.

De la même façon, le président d’une association gestionnaire d’un festival peut déléguer à un directeur technique sa compétence en matière de responsabilité, y compris sur le plan pénal. La délégation en ce domaine doit alors être écrite et le directeur technique avoir réellement les moyens matériels et humains pour accomplir sa tâche. Le directeur technique pourra alors prendre toutes initiatives en vue de la sécurité du public et des installations, et engagera par ses actes l’association.

Le tiers devra alors vérifier les pouvoirs du signataire notamment en lui demandant la photocopie du pouvoir que lui a donné le représentant légal pour engager la société. Il est alors préférable d'annexer ce pouvoir à l'acte.

Le mandat apparent

Si les règles légales ou de dévolution de pouvoir ne sont pas respectées, il sera parfois possible de dire que le contrat est néanmoins valable à l’égard des tiers en invoquant la théorie du mandat apparent.

Ainsi, se fondant sur l’apparence, le tiers pourra se prévaloir d’un contrat signé par un président de société anonyme non directeur général ou par un président d’association loi 1908 même si les restrictions de ses pouvoirs sont inscrites au registre des associations.

En effet, le principe du mandat apparent permet d’engager le mandant, même en l’absence d’une faute susceptible de lui être reprochée, si le tiers pouvait légitimement croire à l’étendue des pouvoirs du mandataire compte tenu des circonstances. C’est-à-dire que celles-ci l’autorisaient à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs (jurisprudence constante).

Parmi les circonstances autorisant le tiers à ne pas vérifier les pouvoirs de son cocontractant peuvent être relevés :
- la faible valeur d’une commande à un fournisseur (10) ;
- l’utilisation par un associé du papier à en-tête de la société (11) ;
- des relations commerciales s’inscrivant dans la durée.

Dans l’arrêt du 11 juin 2002 déjà cité, la Cour de cassation adopte une position sévère à l’égard de la théorie de l’apparence et des conditions exigibles pour qu’un tiers puisse se prévaloir d’un mandat apparent dans les relations d’affaires.

En l’espèce le directeur administratif d’une société anonyme avait signé un bon de commande de plusieurs matériels. La société annule cette commande deux semaines plus tard. Le vendeur assigne alors la société en paiement du montant de la commande se prévalant du mandat apparent du directeur administratif. Pour la Cour de cassation, le vendeur ne pouvait se prévaloir d’un tel mandat du fait qu’il connaissait les fonctions du signataire, directeur administratif et non organe de direction ayant pouvoir d’engager une société anonyme, qu’il ne pouvait ignorer les règles de représentation des personnes morales, qu’il ne prétendait pas que le signataire s’est prévalu d’une délégation de pouvoirs et qu’il n’entretenait pas de relations commerciales avec la société anonyme, enfin que le montant de la commande était élevé. Dans de telles circonstances, il aurait dû procéder à une vérification de pouvoirs que la seule apposition du cachet de l’entreprise sur le bon de commande ne pouvait justifier.

Nous vous conseillons donc de vérifier les pouvoirs du signataire pour tout contrat conséquent (notion fort subjective) et de faire systématiquement préciser au contrat ce qui autorise le signataire à contracter.

Attention, Il convient de noter que l'ensemble de ces développements concerne les contrats de droit privé passés entre personnes privées. Les contrats passés avec l'État, des collectivités locales ou leurs établissements publics peuvent être régis par des dispositions particulières relevant du droit public. Nous aborderons cette question dans un prochain article.

(1) Cour de cassation, 11 juin 2002, n° 99-12720.
(2) Article L 223-18 du Code de commerce.
(3) Article L 225-35 du Code de commerce.
(4) Article 225-56 du Code de commerce.
(5) Article L 225-64 du Code de commerce.
(6) Article L 227-6 du Code de commerce.
(7) Article L221-5 du Code de commerce.
(8) Article 1984 du Code civil.
(9) Article 1998 du Code civil.
(10) Cour de cassation chambre Commerciale du 8 juillet 1981, Bull. civ. IV, n° 315
(11) Cour de cassation chambre commerciale, 2 octobre 1979, n° 77-16010, Cour de cassation civile 1re, 3 juin 1998, n° 96-12505
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