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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Bénévolat des artistes

Chaque mois, nous sélectionnons un article que nous mettons en ligne. Vous pouvez retrouver ces articles publiés chaque mois au sommaire.

Cet article a été publié au numéro 180 du mois de Septembre 2008

Question. - M. Pierre Cardo attire l’attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les difficultés rencontrées par des associations sans but lucratif qui oeuvrent dans le domaine humanitaire et notamment en faveur de l’accueil, en France, d’enfants étrangers défavorisés et qui ont la possibilité de recevoir, en guise de remerciement, des artistes du pays d’origine de ces enfants. Alors que ces derniers qui se proposent de se produire gracieusement en France au cours d’un concert de bienfaisance, à charge pour l’organisateur de prendre en charge les frais de voyage et d’hébergement, ce dernier se voit confronté à des menaces d’interdiction de concert ou de sanctions financières au motif qu’aucune rémunération n’est prévue dans le contrat pour le spectacle au titre de la réglementation sur les intermittents du spectacle. S’il reconnaît la nécessité d’une juste rémunération des intermittents français du spectacle et la volonté du Gouvernement d’agir contre les abus de l’intermittence, il lui demande de lui indiquer si des adaptations ne peuvent être prévues pour ces cas particuliers d’intervention bénévole ponctuelle d’artistes étrangers en faveur d’une oeuvre sociale.

Réponse. - (1) Dans le domaine du spectacle vivant, une disposition du code du travail particulière prévoit une présomption d’existence de contrat de travail pour les artistes. Cette disposition ne s’applique pas aux ressortissants de l’Union européenne qui effectuent temporairement une prestation de service sur le territoire français lorsqu’ils peuvent justifier qu’ils sont établis en qualité de travailleurs indépendants dans leur État d’origine. L’accueil d’artistes étrangers pour des concerts de bienfaisance, sans rémunération, au motif que leur venue serait la contrepartie d’actes humanitaires, ne peut être considéré comme conforme au code du travail français. Il est en outre rappelé que de nombreux cas de « faux bénévolat » verbalisés et jugés, incitent les services de contrôle à une grande vigilance sur ce sujet.

Commentaire. - cette « réponse » qui n’en est pas une nous donne l’occasion de rappeler ce que dit le code du travail et d’aborder la question de l’amateurisme. Il convient de rappeler en premier lieu que la présomption de salariat ne s’applique que lorsque le contrat conclu avec l’artiste en vu de sa production l’est moyennant rémunération (2).

Pour l’écarter et permettre le bénévolat, il est donc nécessaire qu’il n’y ait aucune rémunération, ni directe, ni déguisée notamment par le biais de remboursements de frais ou avantages en nature.

Cependant, il convient en second lieu d’intégrer le fait que l’absence de rémunération n’est possible que lorsque l’activité est exercée dans un cadre non-lucratif au sens de l’article L.8221-4 du code du travail.

Cette notion de non-lucrativité n’a rien à voir avec le mode d’exercice de l’activité. Contrairement à une idée fort répandue, il n’existe pas d’association à but non-lucratif en droit français. Il n’existe que des associations selon la loi de 1901, déclarées ou non déclarées. La notion de non-lucrativité a en premier lieu une définition fiscale (en l’espèce elle ne nous concerne pas), et en second lieu une définition en droit social. Cette notion sociale s’applique à l’activité exercée. Une entreprise ayant une activité lucrative au sens social du terme n’a en principe pas le droit d’avoir recours au bénévolat pour des fonctions techniques exercées dans le cadre d’un lien de subordination et devra toujours salarier les artistes qu’elle engage lorsque ces artistes n’exercent pas leur activité dans des conditions impliquant leur inscription au registre du commerce.

De plus, selon l’article L.8221-4 du code du travail, les activités liées aux spectacles sont présumées accomplies à titre lucratif :
1°. Lorsque leur réalisation a lieu avec recours à la publicité sous une forme quelconque en vue de la recherche de la clientèle ;
2°. Soit lorsque leur fréquence ou leur importance est établie ;
3°. Soit lorsque la facturation est absente ou frauduleuse ;
4°. Soit lorsque, pour des activités artisanales, elles sont réalisées avec un matériel ou un outillage présentant par sa nature ou son importance un caractère professionnel.

Ce dernier cas de figure concerne notamment la production d’enregistrements phonographiques qui est considérée comme étant une activité artisanale.

Le code du travail précise cependant que cette présomption peut être renversée. La personne contre laquelle on l’invoque a alors la charge d’apporter la preuve de l’exercice à but non lucratif de l’activité.

Il sera possible d’apporter cette preuve notamment si l’ensemble des personnes participant à l’opération est bénévole, ne bénéficie d’aucune rémunération directe ou indirecte, les bénéfices de l’opération étant intégralement reversés à des organismes ayant une activité philanthropique ou dépensé dans le cadre de l'objet principal de l'entreprise qui a une nature philanthropique. Mais il faut également prouver que toute l’opération est montée de la sorte. Il n’y a aucune raison que seuls les artistes soient bénévoles si de nombreuses autres personnes sont rémunérées, notamment par le biais de la sous-traitance ou par la perception de droit d'auteur ou d'édition.

Tout le débat autour du bénévolat ne repose que sur l’ignorance ou le refus de l'Etat et du ministère de la culture d’appliquer et de faire respecter la réglementation du code du travail. En effet, un spectacle comme celui du parc de loisirs du Puy-du-fou, qui fait intervenir des moyens très professionnels, qui a recours à plusieurs centaines de salariés, nous semble manifestement correspondre à la définition de l’entreprise à but lucratif au sens du code du travail. Créée par un ancien ministre délégué à la culture, cette entreprise utilise de très nombreux bénévoles qui pourraient sans doute revendiquer un contrat de travail. Elle est montée au créneau pour bloquer le projet de loi sur le bénévolat qui était effectivement nuisible puisqu’il réservait la possibilité de recours au bénévolat aux entreprises agréées par l’institution.

Les chaînes de télévision, en principe contrôlées par le CSA utilisent également largement le recours au bénévolat en abusant de leur supériorité économique pour imposer le bénévolat à de nombreux intervenants.

Il n’y a cependant pas besoin d’une loi pour réglementer le bénévolat ou l’amateurisme, qui créent parfois une réelle distorsion de concurrence. Il suffirait de faire respecter la réglementation existante.

Avant la création du ministère de la culture, l’enseignement artistique relevait de l’éducation nationale et il existait un texte réglementant les activités de spectacle amateur exercées dans le cadre des activités d’enseignement. Le ministère de la culture ayant créé de nombreuses structures d’enseignement en dehors de la réglementation générale de l’enseignement, il est sorti de ce cadre réglementaire existant pour l’enseignement général, ce qui a singulièrement compliqué la matière.

De plus, depuis 1985, les activités de production phonographique et audiovisuelle ne peuvent en principe plus être exercées à titre bénévole puisque l’article L.212-3 du code de la propriété intellectuelle exige que les autorisations de fixation et d’exploitation des interprétations des artistes interprètes soient conclues par écrit et fassent l’objet d’une rémunération.

Roland LIENHARDT
Avocat au Barreau de Paris

(1) QEAN du 5 août 2008 p.6750, n° 935.
(2) Article L.7121-3 du code du travail.



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