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                     Chaque 
                      mois, nous sélectionnons un article que nous mettons 
                      en ligne 
                       
                      Cet article a été publié au numéro 
                      142 de Mars 2005 
                       
                      Lactualité 
                      récente a montré que des producteurs nhésitaient 
                      pas à contracter avec des ensembles artistiques constitués 
                      sous forme associative sans passer de contrat directement 
                      avec les artistes ou musiciens. Dans un tel schéma, 
                      le producteur rémunère uniquement lassociation 
                      qui lui garantit apporter les droits des artistes et musiciens. 
                      Sagissant dune chorale, celle-ci ne rémunère 
                      pas les enfants, la rémunération perçue 
                      par lassociation étant intégralement 
                      consacrée à la réalisation des projets 
                      artistiques de la chorale. 
                       
                      Quelle est la valeur dune telle pratique et quel risque 
                      encourt un producteur ? 
                       
                      Tout dabord, il convient de voir si les enfants qui 
                      nont donc été rémunérés 
                      ni par la chorale, ni par le producteur ont pu céder 
                      quelque droit que ce soit autorisant le producteur à 
                      exploiter efficacement sa bande sonore et le disque réalisé 
                      à partir de la bande musicale originale du film. 
                       
                      Les contours du 
                      bénévolat dans le domaine artistique 
                      Tout dabord, il convient de rappeler que le bénévolat 
                      dans le domaine artistique nest autorisé que 
                      de façon tout à fait marginale. En effet, 
                      il nest possible que si lactivité est 
                      exercée dans un cadre non lucratif. Ouf, direz vous, 
                      cest bien le cas de la chorale des Petits chanteurs 
                      de Saint Marc qui est constituée en association selon 
                      la loi de 1901. Et bien non, vous aurez le plus grand mal 
                      à trouver dans la loi du 1er juillet 1901 qui organise 
                      le contrat dassociation une quelconque référence 
                      à la notion de non lucrativité. Bien au contraire, 
                      larticle 1er de la loi du 1er juillet 1901 précise 
                      que lassociation peut à faire des bénéfices. 
                      Effectivement, sur le plan juridique, il nexiste pas 
                      de catégorie de personne morale pouvant sintituler 
                      " association sans but lucratif ", même 
                      si cette appellation est à tort couramment utilisée. 
                      La définition de la notion de lucrativité 
                      se trouve dune part dans le code général 
                      des impôts, dautre part dans le code du travail. 
                      Les deux définitions sont dailleurs indépendantes 
                      lune de lautre. Nous ne nous intéresserons 
                      quà la définition sociale de cette notion. 
                       
                      La notion dexercice à titre lucratif dune 
                      activité est définie par les articles L. 324-10 
                      et 324-11 du code du travail. Ces textes énoncent 
                      que les activités de production ou de prestations 
                      de service " sont présumées, sauf 
                      preuve contraire, accomplies à titre lucratif lorsque 
                      leur réalisation a lieu avec recours à la 
                      publicité sous une forme quelconque en vue de la 
                      recherche de clientèle ou lorsque leur fréquence 
                      ou leur importance est établie, ou sil sagit 
                      dactivités artisanales, lorsquelles sont 
                      effectuées avec un matériel ou un outillage 
                      présentant par sa nature ou son importance un caractère 
                      professionnel, ou lorsque la facturation est absente ou 
                      frauduleuse. " 
                       
                      Sagissant dune activité de production 
                      de la bande sonore dun film recueillant plusieurs 
                      millions dentrées, dont le disque est lui-même 
                      vendu à près dun million dexemplaires, 
                      et lactivité denregistrement de disque 
                      étant une activité artisanale, il nous semble 
                      que la présomption de lucrativité simpose. 
                      De plus, la chorale présente de 3 à 5 concerts 
                      par mois et a géré une tournée de 35 
                      spectacles.  
                       
                      Or, larticle L. 110-1 du code du commerce énonce 
                      que la loi répute acte de commerce toute activité 
                      de spectacles publics. Lassociation nous semble donc 
                      avoir une activité commerciale par nature impliquant 
                      son inscription au registre du commerce, démarche 
                      quelle na certainement jamais faite (1). 
                      La chorale a signé avec le producteur un contrat 
                      lui octroyant un pourcentage sur les ventes de disques. 
                      Même si ce pourcentage de 1 pour cent est fort faible 
                      au regard des usages, il nous semble difficile daffirmer 
                      que lactivité de lassociation peut toujours 
                      bénéficier de la qualification de non lucrativité 
                      sur le plan social. 
                       
                      Lincidence de la lucrativité sur le plan social 
                      Lactivité de lassociation ne nous semblant 
                      pas pouvoir relever dune activité non lucrative, 
                      elle a lobligation de salarier le personnel quelle 
                      emploie et ne peut recourir à lusage de bénévoles 
                      pour remplir des missions qui relèvent en principe 
                      dune activité salariée. 
                       
                      Il convient donc détudier si lactivité 
                      des chanteurs peut relever dune activité salariée. 
                       
                       
                      Larticle L212-1 du code de la propriété 
                      intellectuelle énonce qu " à 
                      lexclusion de lartiste de complément, 
                      considéré comme tel par les usages professionnels, 
                      lartiste interprète ou exécutant est 
                      la personne qui représente, chante, récite, 
                      déclame, joue ou exécute de toute autre manière 
                      une uvre littéraire ou artistique, un numéro 
                      de variétés, de cirque ou de marionnettes. 
                      ". Les choristes étant indispensables à 
                      linterprétation duvres de chorales 
                      dont ils réalisent la totalité de linterprétation, 
                      il nous semble impossible de prétendre quils 
                      puissent avoir la qualité dartiste de complément. 
                       
                       
                      En conséquence, les dispositions du code de la propriété 
                      intellectuelle leur sont applicables. Or, larticle 
                      L. 212-1 du CPI énonce que : 
                       
                      " Sont soumises à lautorisation écrite 
                      de lartiste interprète la fixation de sa prestation, 
                      sa reproduction et sa communication au public, ainsi que 
                      toute utilisation séparée du son et de limage 
                      de la prestation lorsque celle-ci a été fixée 
                      à la fois pour le son et limage. 
                       
                      Cette autorisation et les rémunérations auxquelles 
                      elle donne lieu sont régies par les dispositions 
                      des articles L. 762-1 et L. 762-2 du code du travail, sous 
                      réserve des dispositions de larticle L. 212-6 
                      du présent code. " 
                       
                      Le code de la propriété intellectuelle énonce 
                      clairement que l autorisation de fixer et dexploiter 
                      linterprétation dun choriste doit résulter 
                      dun contrat écrit, et que cette autorisation 
                      doit saccompagner dune rémunération 
                      régie par les dispositions de larticle L. 762-1 
                      et L. 762-2 du code du travail. 
                       
                      Or, larticle L. 762-1 du code du travail énonce 
                      que " tout contrat par lequel une personne physique 
                      ou morale sassure moyennant rémunération 
                      le concours dun artiste du spectacle en vue de sa 
                      production est présumé être un contrat 
                      de travail dès lors que cet artiste nexerce 
                      pas lactivité, objet de ce contrat dans des 
                      conditions impliquant son inscription au registre du commerce. 
                      " 
                       
                      Il convient de rappeler quun contrat en droit français 
                      peut être verbal. Étant donné que les 
                      choristes ont participé à des spectacles et 
                      à des enregistrements et assuré la promotion 
                      du disque et du film, il y a forcément contrat. Le 
                      contrat na pas prévu de rémunération, 
                      mais, lactivité étant lucrative, cela 
                      nétait pas légal et les choristes étaient 
                      en mesure de revendiquer au moins le SMIC ou les minimums 
                      syndicaux si lactivité de la chorale peut relever 
                      dune activité organisant des minimums de rémunération. 
                      Les artistes nayant aucun contrat écrit, ni 
                      la qualité dassociés intéressés 
                      aux bénéfices et aux pertes de lentreprise, 
                      ils ne peuvent être considérés comme 
                      exerçant leur activité dans des conditions 
                      impliquant leur inscription au registre du commerce. Toutes 
                      les conditions permettant de faire jouer la présomption 
                      de salariat de larticle L. 762-1 du code du travail 
                      nous semblent donc réunies. 
                      La seule manière déviter le risque de 
                      requalification dans ce type de montage, cest que 
                      les artistes soient tous membres de lassociation et 
                      aient la qualité de gérants de lassociation 
                      (pas de bureau, ni de conseil dadministration, et 
                      tous les membres de lassociation inscrits comme responsables 
                      de lassociation dans le cadre de la déclaration 
                      au Centre de Formalité des Entreprises et au bureau 
                      des associations de la préfecture, ce qui nest 
                      de toute façon pas possible pour des mineurs. Dans 
                      un tel cas, sous réserve que lassemblée 
                      générale des associés détienne 
                      réellement le pouvoir de contrôle de lentreprise 
                      sans aucune délégation, le choriste est lui-même 
                      chef dentreprise et il ny a pas demployeur 
                      contre lequel pourrait jouer la présomption de salariat. 
                      Mais dans le cas de la chorale, il existait une vraie direction 
                      artistique et une subordination qui interdisait ce type 
                      de montage. 
                      Vis-à-vis de lassociation, il nous semble que 
                      les choristes peuvent donc indiscutablement invoquer la 
                      qualité de salarié et le fait quils 
                      nont jamais cédé valablement aucune 
                      autorisation de fixation ou dexploitation de leur 
                      prestation. Il nous semble quils peuvent à 
                      ce titre et avec quelque chance de succès demander 
                      linterdiction dexploitation du film et des disques. 
                       
                      La responsabilité du producteur 
                      Le producteur du film ou du disque a conclu un contrat avec 
                      lassociation, ce contrat organisant même une 
                      rémunération de lassociation. Cette 
                      association pourrait elle même invoquer les dispositions 
                      de larticle L. 762-1 du code du travail afin de faire 
                      requalifier ce contrat en contrat de travail d équipe. 
                      Cependant, elle pourrait se voir reprocher dintervenir 
                      dans des conditions impliquant son inscription au registre 
                      du commerce. 
                       
                      Il nous semble par contre possible pour les choriste de 
                      rechercher la responsabilité du producteur sur le 
                      fondement de larticle L. 324-14 du code du travail 
                      qui énonce que " toute personne qui ne sest 
                      pas assurée lors de la conclusion dun contrat 
                      dont lobjet porte sur une obligation dun montant 
                      au moins égal à 3000 Euros en vue de lexécution 
                      dun travail, de la fourniture dune prestation 
                      de service ou de laccomplissement dun acte de 
                      commerce que son cocontractant sacquitte de ses obligations 
                      au regard de larticle L. 324-10 du code du travail 
                      sera tenue solidairement avec celui qui exerce un travail 
                      dissimulé (
) 3° au paiement des rémunérations, 
                      indemnités, et charges dues par lui à raison 
                      de lemploi de salariés nayant pas fait 
                      lobjet dune déclaration unique dembauche 
                      et pour lesquels aucune fiche de paie na été 
                      émise. " 
                       
                      Le code du travail précise que les sommes dont le 
                      paiement est exigible sont déterminées au 
                      prorata de la valeur des services fournis, et de la rémunération 
                      en vigueur dans la profession. 
                       
                      Cette vérification doit même, depuis la loi 
                      du 13 août 2004, être réitérée 
                      tous les six mois (2). 
                       
                      Le producteur aurait donc dû vérifier dune 
                      part que lentreprise avec laquelle il traitait était 
                      bien immatriculée au registre du commerce, ce qui 
                      est obligatoire pour une entreprise commerciale, ensuite, 
                      quelle déclarait et rémunérait 
                      ses artistes, ce qui est obligatoire pour une entreprise 
                      de spectacle intervenant dans un cadre professionnel et 
                      lucratif, et enfin se faire communiquer tous les six mois 
                      copie des preuves de réalisation des déclarations 
                      uniques dembauche et des fiches de paie. 
                       
                      Le droit français 
                      ignore la notion dartiste amateur 
                       
                      Les seuls textes existants dans le domaine de léducation 
                      nationale et des compagnies de théâtre ont 
                      la nature de décret et ne peuvent aller contre les 
                      dispositions impératives du code du travail de nature 
                      légale. Les textes sur la licence de spectacles font 
                      également référence à cette 
                      notion, mais sans en donner aucune définition.  
                       
                      (1)Les registres du commerce refusent 
                      en principe limmatriculation des associations selon 
                      la loi de 1901 de ce type. 
                      (2) Loi n° 2004-809, modifiant 
                      larticle L. 324-14 du code du travail. 
                     
                      Droit de reproduction à usage 
                      commercial et professionnel réservé. 
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                      (Loi du 3 janvier 1995) 
                       
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