|  
                     Chaque 
                      mois, nous sélectionnons un article que nous mettons 
                      en ligne. 
                    Cet 
                      article a été publié au numéro 
                      119 de février 2003. 
                     
                       
                      Il semble difficile d'ignorer depuis quelques mois la possibilité 
                      d'une guerre en IRAK et l'éventuelle implication 
                      de la France dans ce conflit. Le principal danger de cette 
                      guerre, quelle que soit la position que lon a par 
                      ailleurs sur sa nécessité, est quelle 
                      peut multiplier les risques dattentats sur le territoire 
                      français et entraîner une limitation de la 
                      fréquentation des lieux publics que l'on constate 
                      lors des crises de ce type. Certaines collectivités 
                      locales pourraient par ailleurs annuler des manifestations 
                      culturelles par crainte de ne pouvoir assumer les mesures 
                      de sécurité liées à un plan 
                      vigie pirate renforcé. Les professions du spectacle 
                      et de lévénementiel sont toujours particulièrement 
                      exposées à ce type de conflits. Peuvent-elles 
                      contractuellement s'en prémunir ? La guerre relève-t-elle 
                      du régime de la force majeure et est-il possible 
                      de lanticiper et d'en écarter les effets contractuels 
                      indésirables. 
                       
                      Conséquences de la force 
                      majeure :  
                       
                      La survenance d'un cas de force majeure, lorsqu'elle empêche 
                      l'un des cocontractant de remplir ses obligations, a la 
                      particularité de ne pas ouvrir de droit à 
                      dommages intérêts au profit de la partie lésée 
                      (1). 
                       
                      L'événement invoqué à titre 
                      de cas de force majeure doit présenter trois caractéristiques 
                      :  
                      - lextériorité (lévénement 
                      ne doit pas dépendre ou être provoqué 
                      par l'une des parties : lextériorité 
                      sapprécie par rapport à lauteur 
                      ou à la chose à lorigine du préjudice),  
                      - -lirrésistibilité, (lévénement 
                      doit être insurmontable),  
                      - limprévisibilité. Cette dernière 
                      caractéristique nest plus indispensable pour 
                      certains magistrats qui estiment que lévénement, 
                      sil est insurmontable, bien que prévisible, 
                      constitue un cas de force majeure (2). 
                       
                       
                      Toutefois pour que lexonération puisse jouer 
                      dans ce cas, celui qui se prévaut de la force majeure 
                      doit avoir pris toutes les mesures requises pour éviter 
                      la réalisation de cet événement.  
                       
                      La guerre en Irak, annoncée depuis quelques semaines 
                      n'est pas seulement possible, elle est prévisible. 
                      Létat de guerre est-il pour autant un événement 
                      irrésistible et par conséquent susceptible 
                      de constituer un cas de force majeure ? Les juges ont eu 
                      à connaître de cette question suite à 
                      la guerre du Golfe de janvier 1991. Ils y ont répondu 
                      par la négative : létat de guerre ne 
                      relève pas obligatoirement de la force majeure. 
                       
                      Dans une première affaire (3) une société avait invoqué la force 
                      majeure résultant de la Guerre du Golfe pour justifier 
                      en janvier 1991 la rupture unilatérale du contrat 
                      la liant avec un organisateur de voyage chargé de 
                      transporter et dhéberger au Maroc plusieurs 
                      centaines de membres de son personnel. La Cour dappel 
                      a considéré que la circonstance invoquée 
                      nétait ni imprévisible ni inévitable. 
                      La Cour de cassation a confirmé cet arrêt : 
                      Elle a décidé que la Cour dappel retenant 
                      que les circonstances invoquées comme constitutives 
                      de la force majeure nétaient pas insurmontables, 
                      a, par ce seul motif, légalement justifié 
                      sa décision. Elle a estimé dautre part 
                      que le Maroc nétant pas en janvier 1991 un 
                      lieux à haut risque dattentats, la société 
                      soucieuse de la sécurité de son personnel 
                      ne pouvait invoquer la contrainte morale pour justifier 
                      lannulation du voyage. 
                       
                      Dans le même sens un arrêt de la première 
                      chambre civile de la Cour de cassation du 14 janvier 1997 (4) a écarté la force 
                      majeure. Une commune avait fait appel à une société 
                      pour lorganisation dun carnaval en juin 1991. 
                      En février 1991 la municipalité annule cette 
                      manifestation en raison de la Guerre du Golfe intervenue 
                      entre-temps. La Cour dappel a estimé que les 
                      conditions de la force majeure nétaient pas 
                      réunies. Pour la Cour de cassation, étant 
                      donné que le communiqué relatif à lannulation 
                      de la manifestation ne se référait quaux 
                      nombreuses incertitudes tendant notamment à la sécurité 
                      en raison du début de la Guerre du Golfe et que cette 
                      annulation était intervenue quatre mois avant la 
                      date prévue pour la manifestation, aucun élément 
                      ne justifiait que la sécurité de cette dernière 
                      ne pourrait être assurée, la Cour dappel 
                      avait donc pu en déduire que la force majeure nétait 
                      pas constituée. 
                       
                      Ainsi la guerre, ses risques ou 
                      ses effets ne sont pas obligatoirement des circonstances 
                      constitutives de force majeure. 
                       
                      Pour se prémunir contre l'incertitude, mieux vaut 
                      prévoir dans les contrats une clause excluant expressément 
                      la guerre ou le plan de sécurité renforcé 
                      comme événements constitutifs dune force 
                      majeure. Les parties indiqueront dans cette clause qu'elles 
                      sont dores et déjà informées qu'une 
                      guerre est non seulement prévisible, mais probable 
                      et qu'ils s'engagent en connaissance de cause. Cest 
                      une position classique des magistrats : " si lirrésistibilité 
                      de lévénement est à elle seule 
                      constitutive de la force majeure, lorsque sa prévision 
                      ne saurait permettre den empêcher les effets, 
                      il nen est plus ainsi lorsque le débiteur pouvait 
                      normalement prévoir cet événement au 
                      moment de la conclusion du contrat. " Les magistrats 
                      considèrent en effet que les parties ayant pris le 
                      risque en connaissance de cause, il ne serait sans doute 
                      pas juste de permettre à l'une des parties de se 
                      soustraire à ses obligations. 
                       
                      (1) Article 1148 du code civil.  
                      (2) Cass.civ. 1re 9 mars 1994 et Cass.com. 
                      28 avril 1998. 
                      (3) Cass.Civ. 1re 8 déc.1998, 
                      n° pourvoi : 96-17811. 
                      (4) Cass.civ. 1re 14 janvier 1997, 
                      n° 
                      pourvoi 95-11145.  
                    Droit de reproduction 
                      à usage commercial et professionnel réservé. 
                      Droit de reprographie aux fins de vente, de location, de 
                      publicité et de promotion réservés 
                      (Loi du 3 janvier 1995) 
                       
                      © Nodula 2003  
                     |