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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Annexe 16 - 2.
L’intermittence


Ce régime créé d’abord pour les activités cinématographiques, puis élargi aux autres activités du spectacle, accorde aux salariés du spectacle et de l’audiovisuel une spécificité privilégiée que ne connaissent pas les autres catégories socioprofessionnelles intermittentes (intérimaires, pigistes, saisonniers) qui relèvent du régime intérimaire (annexe 4).

L'avantage se situe principalement au niveau de l’ouverture des droits à indemnisation. Ceux-ci prennent effet dès lors qu’on peut certifier de 507 heures travaillées dans l’année. Un seuil qui peut être atteint en 22 jours de travail si l’activité est déclarée sous forme de cachet (1).

Ce système fonctionne depuis maintenant un certain nombre d’années parce qu'il fait apparemment l'unanimité de ses acteurs !

- les salariés y trouvent :


- Un intérêt de prestige certain et bénéficient d'un ensemble de droits patrimoniaux (héritage commun aux artistes). Certains " artistes " revendiquent aussi leur spécificité artistique, un état qui les “différencie“ du commun des mortels relevant du régime général...

Ainsi Robert, technicien de décors qui assure demeurer créatif 24 heures sur 24. “ Quand je ne travaille pas matériellement à une préparation de décors, je pense à des améliorations, je digère mes anciennes créations, je prépare les prochaines... Bref, je suis tout le temps en activité de création !“

- Les salariés ayant ouvert des droits aux ASSEDIC par le biais du régime des intermittents restent inscrits au chômage même quand ils travaillent, pour peu qu’ils soient embauchés sur un contrat de moins de 24 jours.

Dans la pratique, les professionnels usent et abusent de cette situation. Cela permet ainsi d’être déclaré comme travaillant cinq jours de la semaine et d’être au chômage le samedi et le dimanche ou durant le jour de relâche du théâtre. Il suffira de rédiger le contrat de travail en conséquence puisque dans les secteurs du spectacle et de l’audiovisuel, les contrats à durée déterminée peuvent dans certains cas être renouvelés sans limitation.

Un salarié inscrit au chômage dans les annexes VIII ou X peut ainsi être inscrit pendant sept, voir dix ans au chômage et ne pas avoir à s’en plaindre, cela prouve qu’il travaille.

- les employeurs :

Ils bénéficient ainsi d'une main d'œuvre " Kleenex " abondante et disponible en permanence, et peuvent détourner sans trop de risques la législation du travail.

On peut affirmer que le régime des intermittents masque presque systématiquement des emplois quasi-permanents. Le secteur est relativement fermé.

Si les risques de contrôle n’existent quasiment pas du côté de l’administration et des organismes sociaux, il faut tout de même savoir qu’en cas de brouille avec un salarié, les tribunaux requalifieront les nombreux contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. En effet, si la pratique détourne très largement les règles du droit du travail, il n’existe pas d’exception culturelle en ce domaine et les juges amenés à traiter ces problèmes sont souvent totalement " hallucinés " devant le détournement généralisé du droit du travail dans un secteur pourtant étroitement sous tutelle des pouvoirs publics, par le biais du ministère de la culture.

Les grandes entreprises respectent donc assez peu le droit du travail. Cela coûte moins cher d’avoir un procès de temps en temps et de payer les condamnations, que d’être en permanence conforme avec le droit. Quand elles relèvent du secteur public ou para public, le non respect du droit du travail est encore pire, puisque de toute façon , il n’y a pas de chef d’entreprise responsable. En cas de problème, l’État ou les collectivités publiques paient.

Pour les établissements publics industriels et commerciaux, les condamnations ne sont pas payées sur les mêmes chapitres budgétaires que les embauches. L’État lui même incite au recours illégal à l’embauche d’intermittents puisque les créations de postes doivent être approuvées par le contrôleur financier afin de se limiter au cadre budgétaire autorisé. Les créations d’emplois permanents étant souvent interdits, il n’y a pas d’autre possibilité pour répondre à la mission de service public culturel que d’embaucher de façon intermittente, même aux emplois permanents.

Pour les petites entreprises du secteur privée, elles n’ont pas le choix si elles veulent rester concurrentielles, elles doivent faire comme les autres et elles en prennent le risque, le plus souvent inconsciemment.

Les entreprises publiques ou parapubliques étant les premières à recourir à ce système, les entreprises privées qui subissent en permanence la concurrence des très nombreuses entreprises d’État (sous couvert de SARL, de SA ou d’associations loi de 1901) sont obligées de s’aligner et de recourir elles aussi à des emplois intermittents.

Officiellement plus d'1/3 des techniciens intermittents sont des réguliers et un peu moins d'1/3 des artistes. Dans la réalité, la fourchette dépasse le plus souvent les 50% et atteint parfois les 90 % dans les petites et micro structures.

Ils assurent que la réforme du système entraînerait la disparition de nombre de spectacles et d’intermittents, voire le recul ou déclin de certains secteurs : maisons de la culture, music-halls, cirques, cabarets...

Cela serait vrai si une réforme conséquente de ce régime ne s’accompagnait pas d’une remise en question globale de la gestion de la culture en France par les pouvoirs publics, débat que nous espérons initier par cet essai. Il est par ailleurs exact qu’une analyse sérieuse des financements de la culture aboutit à la fois à la dénonciation de ce système et à la remise en cause des entreprises de spectacles privées des fonctionnaires de la culture.

Est-ce à dire qu'une professionnalisation de ce milieu entraînerait l'élimination de nombre d'individus et structures pour cause de non professionnalisme (incompétence, amateurisme...) ou par changement d'appartenance à une nomenclature?

- l'État


C'est le garant du lien social, responsable et gardien du mythe de solidarité interprofessionnelle nationale. Le ministère de la culture souhaite conserver ce système pour des raisons économiques, sociales et culturelles. Il s’agit également surtout de raisons de clientélisme.

Le ministère de la culture est en effet le premier producteur de France. Par le biais des très nombreuses associations et sociétés fictives qu’il a mises en place, il contrôle la majorité du secteur du spectacle vivant. Il a même mis en place des syndicats " patronaux ", composés de personnes en réalité salariées et relevant du statut de la fonction publique, ce qui lui permet ainsi d’intervenir dans le débat sur les ASSEDIC et de bloquer toute possibilité de remise en cause conséquente du système. Les autres syndicats patronaux du spectacle et de l’audiovisuel ne sont pas dupes, mais sont eux-mêmes trop dépendants du ministère de la culture pour pouvoir prendre le risque de s’offusquer publiquement.

La dernière grande crise en 1995 avait été solutionnée par Jacques TOUBON, qui avait remis quelques milliards supplémentaires dans le budget des ASSEDIC afin que le CNPF renouvelle les annexes spécifiques du spectacle et de l’audiovisuel.

Le ministère de la culture étant le premier employeur clandestin de France, ce n’est sûrement pas de lui que viendront les projets de réforme de fond, sauf à y réaliser un ménage conséquent.


Photographie du régime des intermittents

Tous secteurs confondus, leur nombre a doublé de 1985 à 1994. En 1994, on dénombrait 68 000 intermittents dont près de la moitié dans le spectacle vivant. En outre, on assiste à la réduction de la durée moyenne des contrats de 24,5 jours en 1985 à 8,7 jours en 1994 (rapport du sénat 1997).

En 1992, près de la moitié des salariés intermittents du spectacle sont indemnisés.

En 1997 : on évoque le chiffre de 80 % (source : caisse des Congés spectacles)
Pour un franc collecté, le montant reversé aux 40 000 intermittents indemnisés en 1995 a été estimé à 4,5 francs, le déficit des annexes ayant été évalué à 2,186 milliards de francs.

Ils dépendent, en théorie, d'une antenne spécifique, celle du spectacle. Dans cette branche, le recrutement est relationnel à plus de 80 %. La fidélisation est systématique!

Dans les entreprises liées à la culture, 18 % du personnel est en C.D.D. On trouve plus de 70 % d'intermittents dans le cirque, 65 % parmi les groupes musicaux et les entreprises événementielles. Les pourcentages sont plus faibles dans les structures subventionnées et para-municipales.

(1) Cela correspond à 43 cachets de 12 heures. Les cachets sont comptabilisés pour 12 heures chacun s'ils sont isolés, c'est-à-dire jusqu'au 4ème cachet consécutif. Sachant qu'un même artiste peut avoir plusieurs cachets le même jour, par exemple s' ’il se produit dans plusieurs cabarets le même jour ou dans un théâtre produisant deux représentation par jour, l'artiste peut atteindre les 507 heures en 22 jours.

 
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