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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  

Agrégée de lettre, ex-plume de Monsieur Jacques CHIRAC, Madame Christine ALBANEL a été nommée par un décret du 18 mai 2007 ministre de la Culture et de la Communication dans les gouvernements Fillon I et Fillon II (1). Madame ALBANEL a porté à bout de bras le projet de loi dite HADOPI, voté par le parlement en 2009 (2). On ne lui a pas pardonné le retoquage de la loi par le conseil constitutionnel. Elle a été remplacée par Monsieur Frédéric MITTERAND par un décret du 13 juin 2009 (3).

Les rumeurs la pressentaient succédant à Monsieur Bruno RACINE à la tête de la Bibliothèque Nationale de France (BNF). Elle a annoncé en février 2010 qu’elle rejoindrait France Télécom à compter du 1er avril 2010. Madame Christine ALBANEL récupère le poste de directrice exécutive en charge de la communication, du mécénat et de la stratégie dans les contenus. Par la suite, ses prérogatives seront étendues puisqu’elle sera également en charge de la gestion de la communication interne du groupe dans la nouvelle équipe dirigeante de France Télécom, nomination confirmée par Monsieur Stéphane RICHARD, nouveau directeur du groupe.

En tant que ministre de la culture et de la communication, fonction qu’elle a réellement exercée, Madame Christine ALBANEL avait notamment pour fonction :
- de mettre en œuvre la politique du Gouvernement dans le domaine des médias ;
- de participer à la mise en œuvre de la politique concernant les technologies, les supports et réseaux utilisés dans le domaine de la communication (5).

A ce titre, elle a donc exercé un contrôle et une surveillance des entreprises ou organismes spécialisés dans la communication telle que France Télécom.

En effet, la loi HADOPI défendue par Madame ALBANEL visait expressément les fournisseurs d’accès à internet, leur imposant notamment la conservation pour une durée maximale d’un an les données techniques relatives à leurs abonnées. En tant que fournisseur d’accès, France Télécom avait défendu le projet de loi déposé par Madame ALBANEL.

En conséquence, il nous semble que les éléments matériels du délit de prise illégale d’intérêt, prévu par l’article 432-13 du code pénal, pourraient être constitués (6). En effet, au titre de son ancien poste de ministre de la Culture et de la Communication, elle a effectivement assuré le contrôle et la surveillance de France Télécom, entreprise appartenant au secteur privé depuis la loi du 31 décembre 2003. L’impact même de la loi dite HADOPI en est la preuve. Son ancien poste de ministre de la culture l’a inévitablement amené à connaître des dossiers impliquant France Télécom.

Exerçant dorénavant la fonction de directrice de la communication au sein de France Télécom, Madame Christine ALBANEL prend nécessairement et reçoit une participation permanente par travail, conseil ou capitaux dans cette entreprise, collaboration prolongée ou susceptible de se prolonger, et ce moins de trois ans suivant la cessation de ses fonctions de ministre.

S’agissant du mécénat, France Télécom a créé en 1987 la fondation Orange mécénat qui intervient dans le secteur culturel. France Télécom soutient notamment au titre du mécènat l’Opéra Péniche de Paris et la Fondation Royaumont. Or, ces entreprises sont subventionnées, soutenues et contrôlées par le Ministère de la culture. En exerçant une mission de mécénat au sein de France Télécom, Madame ALBANEL prend nécessairement une participation par travail, conseil ou capitaux au sein d’une entreprise dont elle avait la charge, pendant son ministère, d’assurer la surveillance et le contrôle.

Quant à l’élément intentionnel de l’infraction, ce serait faire injure à Madame ALBANEL de penser qu’elle n’aurait pas eu conscience de sa nomination et du fait qu’elle a été engagée à cette fonction en considération de son carnet d’adresse.

Partant, les éléments constitutifs du délit de prise illégale d’intérêt nous semblent réunis.

Au delà de son éventuelle qualification pénale, cet exemple est caricatural. Comment ne pas mettre en doute l’impartialité du ministère dans la mise en place de la réglementation Hadopi, quand on voit que son principal initiateur se fait engager par l’un des principaux intéressés, et sans doute par l’un des plus riches. Comment ne pas s’interroger sur le silence de la presse, largement subventionnée et elle aussi sous tutelle du ministère de la culture… ?

© Nodula février 2010

Une carrière fondée sur des atteintes à la loi répétées

Création de la société Chateau de Versailles Spectacles

Dans le cadre de la président du Château de Versailles, qu'elle exerçait avant d'être nommé ministre de la Culture, Madame ALBANEL avait déjà fait très fort, notamment, Elle a notamment créé la société Château de Versailles Spectacles.

La société Château de Versailles Spectacles est une société de droit privé, une SASU (société par actions simplifiée à associé unique) créée en décembre 2003. Elle se présente comme une filiale de l’établissement public du musée et du domaine national de Versailles.

Cette société a une triple mission :

L’élaboration et la production, la promotion, la diffusion et la commercialisation de spectacles au Château de Versailles. Elle a donc statutairement une mission relevant pourtant des compétences d’un établissement public administratif national.

Le décret du 7 novembre 2005 soumet la société Château de Versailles Spectacles au contrôle économique et financier de l’État prévu par le décret du 26 mai 1955 pour les “ organismes ou entreprises de toute nature exerçant une activité d’ordre économique et bénéficiant du concours financier de l’État sous une forme quelconque, notamment sous forme de participation en capital, de subvention, de prêt, d’avance ou de garantie  ” (7).

Ils sont soumis au même contrôle que les établissements publics de l’État ayant pour objet principal une activité commerciale, industrielle ou agricole, les sociétés ou groupements d’intérêt économique dans lesquels l’État détient plus de 50 % du capital et les groupements et organismes professionnels ou interprofessionnels autorisés à percevoir des taxes, redevances ou cotisations de caractère obligatoire.

Pourquoi une telle filiale ?

La réponse se trouve sur le site Internet du Château de Versailles (www.chateauversailles-spectacles.fr) ; on peut lire que “ filiale de l’établissement public du musée et du domaine national de Versailles, qui la préside, elle a été créée en décembre 2003 et reste la seule structure de ce type en France. Ce statut particulier lui donne à la fois la liberté et les moyens nécessaires pour être garant de l’image du Château et de donner plus de cohérence historique, culturelle et artistique à l’ensemble des manifestations ”.

En effet, en créant une structure de droit privé, le château de Versailles, qui est un établissement public administratif soumis intégralement au droit public et au code des marchés publics dans ses relations avec les tiers, entend pouvoir s’affranchir de l’ensemble de ces contraintes et réaliser des opérations à caractère commercial, notamment produire des spectacles et engager des artistes dans le cadre du droit privé (8).

Or, ce type de montage semble ignorer les dispositions du code des marchés publics et plus particulièrement celles de l’article 3 de ce code qui énonce que lorsqu’une société de droit public soumise au code des marchés publics exerce un contrôle sur une société de droit privée comparable à celle qu’elle exerce sur ses propres services, ce qui est le cas en l’espèce puisque l’établissement public Château de Versailles est le seul associé de la Société Château de Versailles, elle peut ne pas appliquer dans ses rapports avec cette société les dispositions du code des marchés publics, sous réserve que ce soit la société de droit privé qui applique, pour répondre à ses besoins propres, les règles de passation des marchés prévues par le code des marchés publics.

Si la société Château de Versailles est la seule société de ce type en France comme l’indique son site internet, c’est que ce type de montage nous semble relever davantage du code pénal que du code des sociétés. La société, l’Établissement public et sa présidente jusqu'en juin 2007, Madame Christine ALBANEL, (qui n'a pas fait l'ENA), pourraient être sanctionnées à titre principal ou comme complice, notamment au titre de la prise illégale d’intérêt des articles 432-12 du code pénal (9), de l’octroi d’avantage injustifié de l’article 432.14 du code pénal et du détournement de fonds publics de l’article 432.15 du code pénal, outre de recel du produit de ces infractions.

Une société de ce type n’a donc pas le droit de produire des spectacles ou d’engager des artistes hors le cadre du code des marchés publics.

L’État, au lieu de demander la dissolution de cette société et le respect de l’État de droit, organise le contrôle de cette société illégale, présidée par une proche du président de la République, qui a longtemps été sa conseillère à l’Élysée !

L’arrêté du 4 avril 2006 (10) fixe les modalités spéciales d’exercice du contrôle économique et financier de l’État sur la société Château de Versailles Spectacles.

Ces textes ne sauraient utilement déroger aux dispositions légales du code pénal.


(1) JORF du 19 mai 2007 page 9714.


(2) Loi n° 2009-1311 du 28 octobre 2009 relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet, JO du 29 octobre 2009.

(3) Décret du 23 juin 2009 relatif à la composition du Gouvernement, JORF du 24 juin 2009, page 10274.

(4) Décret n° 2007-994 du 25 mai 2007 relatif aux attributions du ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement, JORF du 26 mai 2007 page 9881.

(5) L’article 432-13 du code pénal énonce que : « Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que fonctionnaire ou agent d’une administration publique, dans le cadre des fonctions qu’elle a effectivement exercées, soit d’assurer la surveillance ou le contrôle d’une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer directement à l’autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels décisions, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l’une de ces entreprises avant l’expiration d’un délai de trois ans suivant la cessation de ces fonctions. »

(6) Loi n° 2003- 1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, JORF du 01/01/2004.Quand les Énarques Innovent !!!


(7) Décret n° 2005-1399 du 7 novembre 2005, JO du 15 novembre 2005.

(8) Bénéficiant ainsi des avantages liés au fait que les artistes relèveront souvent du régime des intermittents définis dans les annexes VIII et X de l’accord national interprofessionnel relatif à l’assurance chômage. Les artistes coûteront donc moins cher.

(9) En effet, Madame ALBANEL a la charge de la présidence de l’établissement public Château de Versailles, établissement public administratif en charge du domaine, et elle dirige indirectement la Société Château de Versailles Spectacles, société commerciale dont l’objet social est l’organisation des spectacles et d’animation sur le domaine de Versailles. Elle a donc la surveillance et la direction indirecte d’une entreprise commerciale qui s’est illégalement octroyée une mission relevant de son domaine d’activité publique.

Cet objet social est d’ailleurs illégal puisque l’on voit mal comment une société de droit privé pourrait s’arroger des droits quelconques sur un bien relevant du domaine public.

L’article L.432-12 du Code pénal énonce :
« Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, de recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 Euros d’amende ».

(10) Arrêté du 4 avril 2006, JO du 19 avril 2006 p.5833.



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